Montfort_maison_passive_chanvre_ossature_bois_vue_facades

La découverte initiatique à Masada en 2007 d’un mur chauffant en briques de terre crue vieux de 2000 ans,
La rénovation en 2008 d’une chanvrière incendiée dans le Morbihan (56),
... deux catalyseurs pour l’Architecte Christine Montfort.

Plongée dans la conception d’une maison traditionnelle : elle métamorphose l’ouvrage initial, de briques monomur, en béton de chanvre et mur de masse en briques de terre crue.

 

De la chanvrière du Morbihan

Impressionnée par la résistance au feu du béton de chanvre, elle arpente la France pour mieux comprendre ce combiné, Chaux et Chanvre, qu’elle trouve extraordinaire. Elle y découvre sa capacité à gérer l’humidité de l’air : une propriété tout à fait adaptée au climat de sa Bretagne où il faut sécher l’air intérieur avant de songer à tout simplement se chauffer.

Du mur de terre crue

S’inspirant de Masada ou encore des hypocaustes romains, la maison s’articule autour d’un mur de masse en briques de terre crue, un parti architectural volontairement simple. Les briques viennent du centre de la Bretagne, la terre du terrain étant trop pauvre en argile. Des circulations d’air dans le mur réchauffent l’air en hiver et le rafraîchissent en été pour donner une température intérieure assez constante tout au long de l’année. Sans chauffage, l’hiver dernier, elle n’est pas descendue sous les 17°C. Si nécessaire, une flambée dans le poêle de masse en place chauffe facilement tout le volume. Seuls des porte-serviettes électriques ont été ajoutés dans les salles de bains et cabinets de toilettes. Des prises électriques adaptées ont également été prévues dans les chambres pour palier aux éventuelles affections (refroidissements) des occupants.  Si ces situations restent rares, il ne faut néanmoins pas les occulter.

Un parcours atypique, une expérience audacieuse

Parce qu’elle est architecte mais aussi agricultrice bio et sylvicultrice, elle veut créer sur ce chantier un tout autre rapport aux artisans et entreprises de son secteur. En un mot, elle veut une dimension plus humaine, moins industrielle.

C’est ainsi qu’elle accompagne les agriculteurs dans la récolte du chanvre. Elle les aide à mieux en comprendre les principes et valoriser tout le produit en minimisant les pertes.

Adhérent aux mêmes valeurs, le propriétaire, lui, fait abattre ses propres arbres et les fait tout comme elle débiter par une scierie mobile. Las, des raisons juridiques lui interdiront d’utiliser le bois débité pour l’ossature principale, finalement réalisée en Douglas de la région. Ses chênes et châtaigniers participeront à l’aménagement des dépendances, terrasses et coursives, pergolas, garage et autres finitions intérieures : le parquet de l’étage, la passerelle intérieure et les marches de l’escalier ont été réalisés en chêne massif.

La maison a été conçue et construite suivant les principes MOBC, Maison-Bois-Outil-Concept, méthode initiée par le Centre National du Bois (CNDB) dans le début des années 2000. Une expérience de plus ne lui fait pas peur : l’ossature est fabriquée avec des bois frais d’abattage et de sciage. Un risque néanmoins limité car la démarche a été suivie par un bureau d’études spécialisé.

Montfort_maison_passive_chanvre_ossature_bois


Le béton de chanvre

Avec l’abandon de la brique monomur, l’option est prise de réaliser toutes les faces en béton de chanvre : sol, façades, toiture. Les caractéristiques de ces 3 bétons sont données dans des Règles Professionnelles éditées dès 2006 et mises à jour en 2012 par l’association nationale ‘Construire en Chanvre’.

L’ossature terminée, la toiture (30cm en béton de chanvre) est mise en œuvre en premier pour protéger l’intérieur du bâti et ainsi permettre le placement des réseaux d’eau, d’électricité, de ventilation et la réalisation partielle des cloisons.

S’en suit le montage des façades (36cm de béton de chanvre hors enduits in. et ext.), par projection, et pour terminer celle de la dalle de sol (15cm de béton de chanvre sur empierrement ventilé) à laquelle est intégrée la matière récupérée par le redressement des murs. La technique utilisée pour la dalle de sol ne serait plus autorisée à présent.

Les autres matériaux biosourcés

En dehors du chanvre, d’autres matériaux naturels interviennent dans cette construction :

  • le roseau sur lequel a été déversé le béton de chanvre en toiture,
  • le liège utilisé en soubassement pour assurer la pérennité du bâtiment,
  • du feutre de bois posé au niveau du plancher de l’étage (rupture acoustique), de l’extension au nord (rupture thermique) ainsi qu’au niveau de la couverture (pare pluie) et à l’intérieur des cloisons (confort phonique).

A suivre ...

 

Source : compte rendu de la présentation « La maison saine et passive », Christine Montfort, Architecte,  journée thématique « Les fibres naturelles pour les architectes, une alternative écologique et innovante pour la construction » organisée par le cluster Eco-construction dans le cadre des projets Grow2build et Greenov, 27/05/2014, Moulin de Beez (Namur)
Source de l’illustration d'introduction : « The massive earthen ramp at Masada, constructed by the Roman army to breach the fortress' walls. Photo taken from north of the ramp, looking south » by אסף.צ, 11 March 2005 (original upload date), public domain, commons.wikimedia.org. Son utilisation n’engage en rien l’auteur sur un soutien ou un entérinement éventuel du contenu de l’article.
Source des autres illustrations : crédit photographique - Christine Montfort & Ronan Hascoët