A priori, ramener de l’Ethique en entreprise, pourrait apparaître bien incongru à nombre d’économistes. Les deux choses étant réputées être non-miscibles… à moins de tenter une émulsion.alt


Introduire le développement durable en entreprise, assumer les enjeux de la triple bottom line[1]: Responsabilité économique – responsabilité environnementale – responsabilité sociale en cessant de ne se préoccuper que du seul capital économique pourrait sembler être une gageure.

Pourtant, nombre de sociétés font le pari du durable en s’engageant à traiter non seulement des questions économiques mais également à gérer de manière responsable le capital environnemental et humain. Cette démarche n’est cependant pas « altruiste », ne sombrons pas dans l’angélisme. Dès lors, pourquoi le font-elles ?

Ce positionnement des entreprises est la résultante de dynamiques complexes qui mettent en œuvre différents mécanismes convergeant vers cette prise en charge élargie des responsabilités.

Les groupes de pression (ONG, Syndicats, etc.), la réglementation, le grand public sont à l’origine d’une pression constante et croissante vers un positionnement plus équitable et durable des entreprises. Nous pouvons donc garder notre modèle « économiste » pur et dur, il continuera à être explicatif des évolutions actuelles. Il ne faudrait cependant pas limiter l’analyse au constat que ces seules contraintes supplémentaires sont pourvoyeuses de changements au sein des entreprises. Ce serait passer à côté d’éléments intéressant directement le débat.

Les préoccupations durables sont certes un éléments de marketing « vendeur ». N’en faire toutefois qu’un argument de vente sans rien changer en coulisse que le « packaging » des produits conduirait à assez brève échéance à la catastrophe. Or, implanter les préoccupations durables en entreprise comporte une multitude de bénéfices secondaires. Adopter un abord durable des problématiques permet aux entreprises de s’extraire des raisonnements « court-terme » et « local » pour les projeter dans le « long-terme » et le « global ». Cette prise de recul est salutaire pour l’entreprise qui aura une meilleure perception de ses « risques », de ses limites et de ses objectifs.Les entreprises faisant le pari du durable sont, non seulement, moins sujettes aux tourmentes financières mais elles bénéficient d’un capital confiance supérieur aux yeux des investisseurs.Mentionnons également ici la mise sur pied de fonds d’investissement éthiques, la création en 1999 du DJSI (Dow-Jone sustainable index).

Mieux encore, de 1996 à 2000, aux Etats-Unis, les entreprises ayant fait le pari du durable ont réalisé une surperformance au regard des autres (environ +50%) : « It pays to be green ! » (étude complète en annexe). Les entreprises au travers du durable favorisent leur adaptation en favorisant leur anticipation. Devenir une entreprise pionnière, c’est augmenter ses chances de se créer un marché de niche où l'on excelle. C’est se prémunir contre les mauvaises surprises (avoir à dépolluer un site avant de délocaliser sa production Vs avoir, d’emblée, prévu le plan de réaménagement/réaffectation d’un site au terme de sa période de production). Enfin, la réflexion durable, amène les entreprises à diminuer leurs coûts de production (moins d’énergie, moins de matières premières qui auront parcouru moins de kilomètres, moins de coût de gestion des déchets, moins d’absentéisme, etc.).

En résumé de ceci, retenons que les entreprises qui s’inscrivent dans le durable :

  • Réfléchissent sur un plus long terme et de manière plus globale (objectivation de leur positionnement);
  • Peuvent davantage se fixer des objectifs (élément moteur);
  • Ont une meilleure connaissance des risques et des limites (gage de pérennité);
  • Améliorent l’image de leur entreprise et rassurent les investisseurs (élément marketing);
  • Sont davantage ouvertes au changement et à l’innovation (adaptables, pionnières);
  • Sont plus compétitives;
  • Bref, elles sont plus « Durables »

 

[1] Mireille Chiroleu-Assouline, Prof. A l’Université de Paris 1 Panthéon-Sorbonne, Les stratégies du développement durable des entreprises in « Idées », la revue des sciences économique et sociale (CNDP), p32-39, 25 juillet 2008.