Et si plusieurs chefs d'entreprise se mettaient ensemble pour engager un salarié ? C'est le principe des "groupements d'employeurs", une formule née en France et qui répond à une attente.

Plus de 35.000 personnes y travaillent ainsi de façon partagée. Il n'y en a que quelques-unes en Wallonie et à Bruxelles. Mais la volonté existe de développer la formule.
Pour cela, le ministre wallon de l'Economie et de l'Emploi, Jean-Claude Marcourt (PS), s'est adressé au "Lentic", le Laboratoire d'études sur les nouvelles technologies, l'innovation et le changement lié à l'Université de Liège. Un des douze chercheurs qui le composent, Frédéric Naedenoen, a été chargé de créer un centre de ressources pour promouvoir le groupement d'employeurs et faciliter la vie des chefs d'entreprise intéressés.
Pour Frédéric Naedenoen, cet outil de gestion de la main-d'oeuvre s'inscrit tout à fait dans l'évolution du monde économique et du marché du travail. La grande entreprise qui intègre tous les processus, de la production à la commercialisation, a une allure de dinosaure. Les tâches sont segmentées. Les sous-traitants se multiplient tout comme les "mises à disposition". La taille moyenne des entreprises diminue. En même temps, il y a une nécessité de mobilité des salariés et une forte aspiration à la sécurité.
Le groupement d'employeurs n'avait pas de sens il y a cinquante ans. Il en a de plus en plus en 2009. Son succès en France le prouve. Le dispositif a été imaginé pour les travailleurs saisonniers, qui changeaient d'employeur selon les saisons. Il s'est étendu à de nombreux secteurs, en particulier à la construction. Il concerne aussi des employés dont le travail n'a rien de saisonnier.

Créneau particulier
Le groupement d'employeurs est un dispositif de mutualisation des ressources humaines entre plusieurs opérateurs économiques (privés, publics, marchands, non marchands). Ils partagent les coûts et les temps de travail d'un ou plusieurs salariés. La forme juridique est celle du "groupement d'intérêt économique", par au moins deux entreprises. Celles-ci sont solidairement responsables et cogèrent, par consensus, le personnel employé par le groupement et qui travaille pour elles selon une alternance à déterminer. Cela peut aller de six mois de suite de chaque côté à un ou deux jours par semaine dans chaque entreprise pour des fonctions commerciales, de secrétariat, d'entretien des locaux...
Pour Frédéric Naedenoen, le groupement répond à des besoins qui ne sont pas parfaitement couverts par l'intérim ou le recours à des indépendants. Deux exemples...
"Des PME ont envie d'un site internet vivant, avec une bonne approche marketing. Cela ne nécessite pas une personne à temps plein. En partageant un salarié, elles ont sous la main à un coût raisonnable quelqu'un qui les connaît bien, qui comprend leurs attentes. Et cela n'empêche pas de faire appel à un conseil stratégique à haute valeur ajoutée au bout de quelque temps. C'est la même chose en comptabilité. Un employé partagé peut déblayer le terrain, tenir à jour les comptes. Puis les présenter à un spécialiste qui va les analyser et conseiller."

Obstacle
En fait, la loi autorise les groupements d'entreprises en Belgique depuis 2000. S'ils restent rares, c'est faute de promotion. C'est dû aussi à une disposition voulue par les syndicats qui ne leur permet d'embaucher que des demandeurs d'emploi difficiles à placer. Cette restriction, inexistante en France et à la motivation assez obscure, devrait être levée. "Je n'ai pas encore rencontré un seul responsable syndical qui reste réticent au système quand on lui a bien expliqué de quoi il s'agit. C'est un mécanisme qui permet aux entreprises de grandir, qui est un sas vers une première embauche propre à temps plein, qui crée de l'activité et de l'emploi."

Article paru le 03/02/2009 sur le site de Newbizz (http://www.newbizz.be)