peinturePeindre est probablement une des plus vieilles technologies qui existe ! En effet les premières traces d’une utilisation de couleurs par l’homme remontent, pour les grottes de Lascaux, à environ 17.000 ans.

Au début les peintures étaient utilisées pour décorer et embellir des objets par leur polychromie.

Par la suite le rôle protecteur des peintures apparut pour lutter contre la dégradation du bois et des matériaux de construction.

Une des conséquences de la révolution industrielle a été l’usage sans cesse croissant de l’acier qui a la fâcheuse tendance de se corroder sous l’action des intempéries. Il a donc fallu produire de plus en plus de revêtements pour ralentir, voire vaincre la corrosion des constructions métalliques (ponts, bateaux en acier et non plus en bois, …).

Peinture_sur_support_métalliqueEt maintenant, on demande aux peintures d’être multifonctionnelles c’est-à-dire qu’en plus de décorer, d’embellir et de protéger, elles doivent avoir une propriété supplémentaire.

Par exemple être autonettoyantes, réduire la contamination bactérienne, diminuer la consommation d’énergie, être autocicatrisante, refléter l’infrarouge et les ondes électromagnétiques, être antibruit, antigraffiti, avoir un effet « Lotus », …

On le voit les peintures ont évolué au cours des siècles. Mais en parallèle, les techniques de mise en œuvre ont également évolué : enduction, aspersion, pulvérisation, trempé et application électrostatique. Les technologies des peintures évoluant, les modes de séchage ont également évolué : séchage par air chaud, séchage par infrarouge, par irradiation ultraviolette, par faisceaux d’électrons. Mais l’automatisation des procédés de mise en peinture a aussi fait des progrès considérables.

Enfin, la protection de l’environnement en phase avec le développement durable devient une préoccupation journalière pour l’utilisateur comme pour le fabricant de peintures. Des nouvelles peintures, pour remplacer les peintures en phase solvant conventionnelles, ont ainsi vu le jour : peintures aqueuses, à haut extrait sec, en poudre, à séchage ultraviolet ou par flux d’électrons. Le défi  de l’industrie de la peinture a été de développer des alternatives aux peintures conventionnelles sans perte de performances. Ces nouveaux développements ont été réalisés dans le cadre d’une législation de plus en plus importante et contraignante quelques fois moteur de l’innovation technologique. 

vieillissement_peinture2. Mais en fait qu’est-ce qu’une peinture ?

Une peinture est un produit de très haute technologie et extrêmement complexe.

Il s’agit d’une substance fluide qui, appliquée en couches minces sur différents supports, forme sur celui-ci un revêtement solide et adhérant et conférant au support une protection et une décoration durables voire dans certains cas une fonctionnalité supplémentaire. Le passage de l’état fluide à l‘état de film solide s’appelle le séchage.

 

3. Quels sont les constituants d’une peinture ?

Quatre familles de produits interviennent dans la fabrication d’une peinture :

  • un ou des liant(s),
  • des pigments et charges,
  • des additifs,
  • et, dans la plus part des cas, un vecteur liquide (solvant ou eau). Les peintures « poudre » font exception car elles ne contiennent ni solvant ni eau.

Passons en revue les différents composants de la peinture.

3.1. Les liants

Les liants sont des matériaux filmogènes, de nature organique.

Pour les chimistes, il s’agit de polymères, ou d’oligomères qui ont la propriété de sécher soit par processus physique, soit par processus chimique soit par une combinaison de processus physique et chimique. Le rôle du liant est, comme son nom l’indique, de lier le film formé à son support ; il est donc responsable de l’adhésion et de l’adhérence de la peinture au support. Il y a toute une série de liants dont le nom donne quelques fois le nom à la peinture : on parlera ainsi de peinture alkyde, vinylique, cellulosique, acrylique, phénolique, époxydiques, polyuréthane, polyester, silicone car les liants sont des alkydes, vinyles, acryliques, … Le développement de la chimie des polymères a mis sur le marché un très grand nombre de liants différents.

Si le liant ne contient ni pigment ni charge, on aura un vernis. Par contre si on ajoute au liant un colorant, on obtiendra un vernis coloré qui laissera apparaître le support mais coloré cette fois. Si on ajoute des pigments au liant, on obtiendra une peinture.

3.2. Les pigments & charges

3.2.a. Pigments

Les pigments peuvent être de nature organique, minérale ou métallique. Les pigments ont un fort pouvoir colorant et un fort pouvoir opacifiant.

Ils sont insolubles dans les liants et les solvants et très onéreux.

Ils se différencient par leur couleur : blancs, noirs, jaunes, rouges, bleus, bruns et violets. Il en existe des milliers et il est bien entendu impossible de les citer tous. Mais citons en quelques-uns :

  • pigments minéraux : le dioxyde de titane,  le blanc de zinc, les noirs de carbone (qui proviennent de la calcination de pieds de vigne ou d’os), les oxydes de fer noir ou rouge, les terres de sienne et les terres d’ombre, les vert et jaune de chrome, les oranges et rouges de molybdène, le bleu de Prusse, le bleu d’outremer, les jaunes et rouges de cadmium, … Certains pigments minéraux ont des effets particuliers comme les pigments nacrés, irisés.
  • pigments organiques : les pigments azoïques, les phtalocyanines, les quinacridones, les dérivés du thioindigo, les pigments de dioxazine, …
  • pigments métalliques : pigments d’aluminium, de bronze, d’argent, d’or, les poussières de zinc, …

Certains pigments ont des propriétés supplémentaires au pouvoir colorant et opacifiant. Citons les pigments anticorrosion qui jouent un rôle actif dans la protection contre la corrosion (poussières de zinc, phosphates de zinc, …), les pigments à effet dont la couleur varie en fonction de l’angle d’observation, les pigments qui reflètent les rayons infrarouges, …

3.2.b. Charges

Les charges sont toujours d’origine minérale. Elles ont un faible pouvoir colorant et un faible pouvoir opacifiant et sont introduites dans les peintures pour des raisons techniques particulières et économiques.

On les appelle quelque fois diluants minéraux. Citons les principales : le talc, la craie, la calcite, la dolomie, la barytine, le kaolin, la bentonite, la ponce, le verre, la silice, l’alumine.

Les charges peuvent donc conférer aux peintures des propriétés particulières. Elles peuvent régler la viscosité des peintures, agir sur la perméabilité, la souplesse, la brillance, la résistance à l’usure, au feu, aux intempéries, aux agents chimiques, à la salissure.

La quantité de pigments et de charges que contient une peinture influe grandement sur certaines propriétés des peintures comme la perméabilité, la brillance, …

peinture_additif_viscosite3.3. Les additifs ou adjuvants

Un grand nombre de substances est incorporé aux peintures pour jouer divers rôles. Agents de mouillage, de dispersion, d’anti-sédimentation, fluidifiants, épaississants, et anti-peaux assurent une bonne présentation et une bonne conservation de la peinture.

D’autres ont un rôle actif dans la filmogénation, promoteurs ou catalyseurs (les siccatifs par exemple), ou un rôle dans la tenue du film (hydrophobes, ignifuges, bactéricides, fongicides, etc. ). Ces additifs sont toujours ajoutés dans de très faibles concentrations mais jouent un rôle primordial dans les performances de la peinture tant à l’état sec qu’à l’état liquide.

3.4. L’eau et les solvants

Un solvant est un liquide, simple ou mixte, volatil dans des conditions normales, ayant la propriété de dissoudre complètement le liant organique.

Dans certains cas, les solvants doivent rester inclus dans le film de peinture, lorsqu’ils interviennent dans sa formation, par réaction avec le liant réactif. Il existe une très grande variété de solvants qui se différencient par leur pouvoir de solubilité, leur vitesse d’évaporation et par leur nature chimique. En fait on trouvera toujours un ou des mélange(s) de solvants pour solubiliser un polymère. En jouant sur la volatilité des solvants on peut régler par exemple la vitesse de séchage des peintures.

Les solvants confèrent au(x) liant(s) la viscosité nécessaire pour permettre l’application de la peinture. La problématique des composés organiques volatils dans les peintures pour le bâtiment sera abordée dans un chapitre sur la législation et l’environnement.

L’eau n’est pas un solvant pour la plupart des polymères (liants) organiques. Les chimistes ont donc dû trouver une solution pour réaliser des peintures à l’eau.

Puisqu’on ne sait pas mettre le polymère en solution, les chimistes ont synthétisé des liants en émulsion (comme une mayonnaise) ou en dispersion et qui sèchent non plus par évaporation mais par coalescence des particules de polymère. La bonne coalescence des particules de polymère conditionne la formation du film de peinture et donc les performances de la peinture et nécessite une certaine quantité de solvant (appelé agents de coalescence). En d’autres termes, la très grande majorité des peintures à l’eau contiennent une certaine quantité de solvant.

Les peintures en poudre ne contiennent ni eau ni solvant.

Cette technologie, basée sur des matières premières cent pour cent solides et empruntée aux procédés de transformation des matières plastiques, se différencie de la fabrication des peintures liquides par la disparition totale de solvants et de dispersants organiques ou aqueux. La peinture poudre est projetée électrostatiquement sur un support conducteur et l’ensemble est ensuite passé au four ou la poudre fond et forme un film dur, adhérant et continu. Ce type de peinture ne s’utilise qu’en industrie.

On reviendra plus en détails, dans un autre article, sur les différents mécanismes de formation des films de peinture et sur les facteurs qui influencent la bonne formation du film. 

4. En conclusion

La peinture : un produit de haute technologie, pointu, avec des équilibres physico-chimiques complexes et qui nécessite beaucoup de recherche et développement et de mise au point pour être performant mais un produit tellement important pour embellir et protéger les bâtiments et qui nécessite une grande maîtrise lors de son application. 

Références :

  • Manuel de peintures et vernis. Des concepts à l’application. André Revillon & Pierre Lacaze, Hermann, Paris 2005.
  • Peintures & Vernis. Les constituants. Pierre Grandou & Paul Pastour, Hermann, Paris 1966.
  • Manuel de Technologie des Peintures et Vernis. Brock, groteklaes & Mischke, Eurocol, Offranville 2002.
  • Formulation des Peintures et Vernis. Bodo Müller & Ulirich Poth, Eurocol, Offranville 2004.
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Hugues L. Dedeurwaerder

Chargé de mission pédagogique
Centre de Compétence PIGMENTS

Conseiller Principal
CoRI – Coatings Research Institute