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Centre-Pomidou-Paris-cheminees

Inauguré en 1977, le Centre Pompidou a inexorablement vieilli. De 2023 à 2027, il sera fermé au public pour une rénovation lourde.

Voilà un parfait prétexte pour une courte réflexion sur le passage des ans en architecture sous l'angle esthétique et technique, de la modernité et la pérennité.

Le retour aux sources

Au début du XXe siècle, plusieurs quartiers parisiens sont considérés comme « îlots insalubres », requérant des interventions urbanistiques d’importance. Vétusté, surpopulation, maladies, difficultés de circulation, ... sont quelques-uns des facteurs qui vont signer leur disparition ou leur rénovation. Dix-sept sont répertoriés. Associé au quartier Saint-Merri, le plateau Beaubourg est en tête de classement, déjà partiellement rasé dès les années 30.

Vu ses dimensions, le site, dont l’histoire remonte au Moyen-Age, est parfait pour l’implantation d’une nouvelle structure dynamique entièrement dédiée à l’art et la culture. Elle a l’ambition d’y réunir un Musée d’Art moderne, une grande bibliothèque publique et un centre de création industrielle. Pour un contenu aussi culturel, un bâtiment conçu comme une œuvre d’art contemporaine s’impose. Bienvenue au Centre national d'art et de culture Georges Pompidou !

1971 - 2021

Un demi-siècle s’est écoulé depuis que l’équipe d’architectes italiens Renzo Piano, Richard Rogers et Gianfranco Franchini, a remporté le concours international pour le Centre Pompidou alors que 681 projets avaient été proposés. Si leurs tubes colorés détonnaient pour l’époque, d’autres projets parmi les primés étaient tout aussi stupéfiants : un œuf, une cheminée, un origami, … Marine Chassagnon y a consacré un article pour l’Huffingtonpost. Il est illustré avec les planches de l’époque tout droit sorties des archives du Centre (consultez-le ici ou via les sources).

Voilà qui pose la question de la modernité.

 

La modernité

Une autre perle que cette interview datant de 1977, en provenance des archives de l’Institut national de l’audiovisuel (INA – France).

Blanche et Célestine, toutes deux octogénaires, sont allées voir cette attraction dont tout le monde parle. Leur avis est plutôt mitigé. L’une évoque un « bateau de guerre », l’autre « un siècle d’armatures et de ferraille ». Et le commentateur de signaler que la fréquentation est plutôt jeune, 60 % du public a moins de 35 ans.

 

 

Il est vrai qu’à l’époque, le style a de quoi surprendre : structure métallique apparente en façade, gaines colorées, tubes de verre pour les circulations, ...

Même si les quolibets fusent « Notre-Dame de la Tuyauterie », « Raffinerie de pétrole », « Hangar de l’art », … le succès est au rendez-vous. Le public se presse, qui pour voir le bâtiment, qui pour visiter les expositions.

L’ensemble bâti s’étend sur les 103 305 m² en comptant locaux techniques et parking. Dix niveaux constituent le bâtiment principal. Huit, dont deux en sous-sol, sont accessibles au public. Chacun couvre 7500 m² avec une hauteur sous plafond de 7 mètres (10 pour le Forum). Ils sont conçus comme des espaces libres, polyvalents et parfaitement modulables parce que la structure et tout l’équipement technique sont rejetés à l’extérieur.

Centre-Pomidou-Paris-facade-avec-tube-de-verre

Ce parti constitue l’identité architecturale du bâtiment, une volonté esthétique renforcée par les codes couleurs utilisés pour structurer les circulations :

Avec son orientation Nord-Sud, le Centre s’insère dans la trame urbaine résiduelle et périphérique. Cette option urbanistique a libéré la moitié de la parcelle qui a pu être reconvertie en une large esplanade devant la façade principale. Agréable aux nombreux visiteurs pour y déambuler ou s’amuser des animations libres, elle fluidifie la circulation.

La perception de l’architecture est éminemment liée à la culture et à une époque. Tout bâtiment est (plus ou moins) porté par une symbolique, expression philosophique et/ou organisationnelle. Il est en connexion avec la communauté et son environnement. Beaubourg n’y déroge pas.

Renzo Piano, considéré comme un architecte visionnaire, l’a bien compris et a relevé le défi. Retour dans les archives de l’INA. Ecoutons-le.

 Aujourd’hui, le Centre Pompidou et devenu un des monuments parisiens incontournables.

Les réalisations qui font débat aujourd’hui seront-elles les références de demain ? Qu’est-ce que la modernité ?

 

La pérennité

Le Centre a connu au fil des années des interventions plus ou moins importantes. La fréquentation est intense, il vieillit.

Le temps passe et des entretiens réguliers sont nécessaires. Les besoins évoluent et de nouvelles activités viennent s’y greffer. Il doit se remodeler, s’agrandir, évoluer.

Au-delà de la gestion journalière, une première intervention lourde a eu lieu de 1997 à 2000, nécessitant une fermeture au public de 27 mois. Le Centre en ressort agrandi de 8000 m², restauré, réorganisé tant à l’intérieur qu’à l’extérieur. Le projet a été mené par l’un des architectes fondateurs, Renzo Piano dont la mémoire collective garde le nom attaché à l’oeuvre.

Le temps passe, les raisons reviennent et s’aggravent, une nouvelle rénovation en profondeur est programmée dès 2023.

Celle-ci sera d’envergure puisqu’il sera fermé au public pendant presque 4 ans. L’option a été préférée à celle d'un chantier dans un bâtiment ouvert au public, considérée comme plus chère, plus longue, également en termes de nuisances pour les riverains. La réouverture est prévue pour son 50e anniversaire en 2027.

Entre-temps, il aura été :

Des travaux sont déjà en cours, notamment au niveau des escalators dans les tubes de façade.

Centre-Pomidou-Paris-tube-de-verre

Le schéma directeur a été approuvé par le ministre de la culture fin janvier 2021. L’objectif de cette cure de jouvence est de propulser le bâtiment dans le 21e siècle, de répondre aux enjeux énergétiques et environnementaux, de l’inscrire dans une démarche culturelle ET durable tant du point de vue de la longévité que de l’environnement.

Bien évidemment, de multiples questions sous-tendent cette propulsion. Pour n'en citer que quelques-unes :

Mais aussi ...

Les réalisations d’aujourd’hui avec leur maquette numérique (BIM) seront-elles plus faciles à gérer demain ? Qu’est-ce que la pérennité ?

 

 

Sources :
- « Îlots insalubres parisiens du début du XXe siècle », fr.wikipedia.org
- « Centre national d'art et de culture Georges-Pompidou », fr.wikipedia.org
- « Découvrez à quoi aurait pu ressembler le centre Georges Pompidou », Marine Chassagnon, 31/01/2017, www.huffingtonpost.fr
- « L’architecture visionnaire de Renzo Piano », La rédaction, 16/10/2019, lumieresdelaville.net
- www.centrepompidou.fr
- « Centre Pompidou à Paris : une fermeture en 2023 et 3 ans de travaux​ pour rénovation », Anne-Sophie Lesage-Münch, 26/01/2021, www.connaissancedesarts.com
- « Le centre Pompidou va fermer pour 4 ans à partir de mi-2023 », Le HuffPost avec AFP, 25/01/2021, www.huffingtonpost.fr
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