La portée de l’économie circulaire est plus vaste que celle de la linéaire. A côté du réemploi de matériaux, elle active d’autres valeurs : sociale et écologique.

N’entend-on pas emploi dans réemploi ?

L’économie circulaire n’a pas la volonté de s’inscrire dans un système économique pur et dur, qualifiable « du profit à tout prix » dans une approche peu nuancée. Les dimensions humaine et environnementale sont normalement prises en considération, une vision qui se veut plus juste et plus durable.

Pour les hommes

Valeurs

L’économie circulaire est porteuse d’emplois mais les talents de travailleurs ne seront rien s’ils ne s’accompagnent d’une vie professionnelle de qualité où l'épanouissement, le bien-être, l'ergonomie et la sécurité sont pris en considération.

La diversité des profils est importante. Tous ne sont peut-être pas encore décrits aujourd’hui ! A côté de fonctions nécessitant des qualifications élevées et des compétences particulières, ce secteur s’ouvre à la réinsertion professionnelle via l’économie sociale et solidaire, à la reconversion. Si le propre de l'économie circulaire est de recycler les ressources matérielles, le même raisonnement s'applique au « capital humain » pour :

  • favoriser l'employabilité et offrir des opportunités intéressantes aux personnes (ou aux entreprises) en difficulté;
  • changer le regard porté sur les ressources dites humaines et oser faire appel à l'intelligence collective;
  • améliorer les processus et innover dans la gestion;
  • concrétiser sans tartuferie, au quotidien et pour tous ;
  • réveiller le sens de l’engagement et la motivation;
  • retisser le lien social.

Il génère un emploi local lié à l’implantation du bâtiment et des chantiers, en principe, non délocalisables à condition que les matériaux issus de la déconstruction ne soient pas exportés pour traitement.

Des filières liées à la collecte, au reconditionnement, à la réparation ainsi que la logistique vont progressivement se mettre en place, à l’exemple de Knauf Circular ou Isover Recycling. 

Formations

Quand des filières se développent, quand de nouvelles compétences sont requises, … la formation n’est pas loin.

Lien vers la nouvelle session du MOOC (la troisième qui débute ce 04 mai)

S’engager dans ces nouvelles pratiques sous-entend innovation, créativité, expérimentation, … pour la meilleure corrélation entre les besoins des entreprises et les attentes des (futurs) apprenants.

La mise à jour des compétences et l’acquisition de compétences additionnelles s’inscrivent tout naturellement dans la formation continue alors que les métiers inédits (ou pas) feront appel à un parcours découverte - formation / apprentissage.

D’autres méthodes de partage de connaissances et d’expériences telles que le parrainage ou le mentorat se révèlent parfaitement en phase avec la pratique de la circularité. Elles sont d’autant plus intéressantes qu’elles sont efficaces et valorisantes.

Numérique

Déconstruction, identification, stockage, valorisation, … sont autant d’étapes du processus qu’il faut explorer. Elles constituent un flux interconnecté. Ici aussi, le numérique sera un auxiliaire précieux à travers des plateformes dédiées (existantes ou à venir), l'incontournable BIM et son dérivé en économie circulaire, le RIM pour Ressource Information Modeling, …

Tout comme le BIM, le RIM est un outil de modélisation innovant développé par Suez et la start-up Resolving spécifiquement pour les chantiers de déconstruction. La société a présenté son produit à la marque déposée, baptisé batiRIM® lors du MIPIM 2018 en ces termes : « Cette solution permet, en effet, de quantifier, qualifier et cartographier les flux de produits et de matières issus de bâtiments en rénovation, réaménagement ou déconstruction et d’évaluer, avant même le début des travaux, leur potentiel de réemploi, réutilisation et recyclage. » .

Tout comme le BIM, son utilisation optimale ne peut être envisagée que sous l’angle d’un processus collaboratif. A plus longue échéance, ne pourrait-elle être considérée comme le prolongement naturel du BIM  qui, une fois les données complétées et mises à jour, intégrerait les coûts de recyclage et de réemploi ? Continuons sur la lancée. Compte tenu que la vente en ligne rencontre de plus en plus d’intérêt auprès des particuliers et des professionnels, le lien ne devrait pas tarder avec les plateformes commerciales. Petit retour dans le passé avec l'Institut national de l'audiovisuel (INA - France) pour se rendre compte du chemin parcouru en 40 ans !

Et ce n'est pas tout. Il existe un autre prolongement du BIM, le CIM pour City Information Modeling, Les maquettes individuelles s'intègrent dans un ensemble à l'échelle d'un territoire ou d'une ville. Les données sont modélisées et gérées avec des paramètres additionnels propres à la ville intelligente tels que flux de circulation, qualité de l'air, conditions météo, consommation énergétique, ... Une piste de plus pour l'économie circulaire ? Les villes ne sont-elles pas considérées comme des gisements de ressources particulièrement riches ?

 

Pour la planète

Les travailleurs de l’économie circulaire sont aussi des citoyens inquiets face aux changements climatiques. Qu’une entreprise prenne ses responsabilités en s’engageant dans une démarche (réellement) durable ne les laisse pas indifférents. Ensembles, ils seront acteurs du changement.

Les bénéfices environnementaux ne sont plus à démontrer. La pression sur les ressources diminue simultanément à la réduction du gaspillage. On ne peut malheureusement l’espérer proportionnelle si la consommation conserve son rythme effréné.

Jusque dans les années 1950, avant les « Trente Glorieuses » qui signent un extraordinaire essor économique, le gaspillage était exclus du quotidien de la plupart des gens. Regardez cette interview que l'INA, une véritable mine d'informations, a mis en ligne pour la Journée de la terre le 22 avril dernier. Le géologue Claude Guillemin y interpelle sur l’économie de consommation. C’était en 1974. Il pense alors que les dérives qu’elle génère ne peuvent qu’imposer un autre système économique dans 20-25 ans.

Où en sommes-nous 50 ans plus tard ?

L’urgence de 1974 est toujours d’actualité. La situation n’en est que plus alarmante. Une des solutions passe par l’économie circulaire.

  • Elle réduit l’impact environnemental des activités de l’homme sur la planète.
  • Elle participe à la réduction des émissions de CO2 et de gaz à effet de serre (GES).
  • Elle permet une gestion durable des matières premières d’autant plus qu’elles sont non renouvelables et retarde au maximum leur épuisement (un exemple avec cette infographie sur les métaux lourds : www.qqf.fr).
  • Elle limite les tensions géo-politiques liées à l’approvisionnement.
  • Elle s’ouvre à la collaboration entre secteurs.

La règle des 3R pour « réduire, réutiliser, recycler » qui a pour but de gérer les produits en fin de vie et les rebuts prend tout son sens. Les limites peuvent même être repoussées avec celle, plus étendue, des 5R pour « refuser, réduire, réutiliser, recycler, rendre » et son objectif du zéro déchet. Ne devraient-elles pas devenir les mantras des générations futures ?

Cette approche fait appel à la créativité de tous, à l’exemple d’Elaine Yan Ling Ng, une designer sino-britannique, internationalement reconnue et considérée comme une fée dans son domaine d’expertise (textile, électronique, biomimétisme). N’a-t-elle pas créé une collection de carrelages muraux avec des coquilles d’oeufs provenant de l’agro-alimentaire ?

Il reste juste à espérer que ce modèle résilient rencontre l’intérêt du plus grand nombre, avec une période de transition aussi courte que possible.

 

 A suivre ...

Lire aussi :

 

 

Sources :

- « Économie circulaire : AGYRE et le CCCA-BTP partenaires », Rose Colombel, 15/04/2021, www.batiweb.com
- « Knauf Circular se déploie sur toute la France », Rédaction bâtiment, 16/02/2021, batijournal.com
- « Journée mondiale du recyclage : quid de la laine de verre ? », Frédéric Burguière, 18/03/2021 (modifié le 169/03/2021), www.futura-sciences.com
- « Où en est le RIM, le BIM de la déconstruction ? », R. D., 29/05/2020, www.batiactu.com
- « BTP : SUEZ lance batiRIM®, la première solution digitale permettant une déconstruction sélective des bâtiments », 15/03/2018, www.suez.com
- « Economie circulaire et ressources humains - Une étonnante corrélation », Mathilde MOSSE, 12/2021, www.pourlasolidarite.eu
- www.elaineyanlingng.com
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